La remise du prix Seligmann contre le racisme s’est tenue dans le grand salon de la Sorbonne, le 19 mars 2019.

Une date symbolique et chargée d’émotion, sept ans jour pour jour après les attentats de Toulouse, alors que, hasard du calendrier, le prix honore notamment Souviens-toi de nos enfants (Grasset – 2018), dans lequel Samuel Sandler, avec la journaliste Emilie Lannez, évoque l’assasinat de son fils et de deux de ses petits-enfants.

Autre ouvrage primé, Les Naufragés de l’enfer – Témoignages à bord de l’Aquarius (Digobar – 2017), de Marie Rajablat et Laurin Shmid (photos), le jury ayant en outre décerné une mention spéciale au livre Les Mythes fondateurs de l’antisémitisme, de Carol Iancu (Privat).

Les auteurs se sont exprimés après la remise des prix, Samuel Sandler pour appeler chacun à se souvenir, comme moyen de lutter contre la haine, et Marie Rajablat pour décrire son expérience à bord de l’Aquarius, « îlot éphémère » pour des femmes, des hommes et des enfants « exclus de l’humanité ».
Une vibrante cérémonie, au cours de laquelle Stefano Bosi, vice-chancelier de l’Académie de Paris, a souhaité honorer tous ceux qui participent au combat pour la raison et la tolérance et Guy Snanoudj, membre du jury, a rendu hommage « aux anonymes, aux associations, aux ONG qui, quel que soit le prix à en payer parfois, choisissent d’aider leurs semblables ».

Pour revivre les moments forts de cette cérémonie, la Fondation Seligmann reproduit les discours des intervenants.

 

Discours de Stefano Bosi, vice-chancelier des universités : 

Mesdames et Monsieur les Ministres,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs les membres du jury,
Madame la Déléguée adjointe interministérielle, Monsieur le Grand Rabbin de France,
Monsieur le Président du Conseil représentatif des institutions juives de France, Madame le Rabbin,
Mesdames et Messieurs les Représentants d’association, Madame et Messieurs les lauréats,
Madame la Proviseure adjointe,
Mesdames et Messieurs,

Chers élèves,

Je suis heureux et honoré de vous accueillir aujourd’hui en Sorbonne pour la remise solennelle du Prix Seligmann. Le recteur Gilles Pécout, retenu par d’autres obligations, regrette de ne pouvoir être présent parmi nous. Je désire tout spécialement saluer Madame la Ministre Yvette Roudy et Monsieur le Ministre Pierre Joxe, membres du jury. Je souhaite également la bienvenue aux autres membres du jury, aux lauréats et à l’ensemble des invités.

Le Prix Seligmann Contre le Racisme a été créé en 2004 à l’initiative de Madame Françoise Seligmann, en mémoire de son mari, François-Gérard Seligmann, aux côtés duquel elle a lutté contre le nazisme, au sein de la Résistance, et contre l’injustice et l’intolérance, durant toute leur vie commune. Ce prix a pour vocation d’honorer « ceux qui participent au combat pour la victoire de la raison et de la tolérance en s’attaquant aux sources du racisme ». Par acte de donation, il appartient à la Chancellerie des 1 universités de Paris de procéder à la remise de ce prix. Ce n’est pas sans émotion que je participe à cette cérémonie hautement symbolique. Toutes les victimes du « refus de l’autre » méritent notre égal soutien. La remise de ce prix est une manière puissante de le rappeler.

Cette année, les membres du jury ont souhaité que cette récompense soit conjointement attribuée à Madame Marie Rajablat pour son ouvrage Les naufragés de l’enfer et à Monsieur Samuel Sandler pour son livre Souviens-toi de nos enfants. Ce prix partagé n’est pas un prix divisé en deux, c’est un prix dont la valeur est en quelque sorte redoublée. Ces deux témoignages bouleversants se répondent l’un à l’autre. Les histoires sont différentes, mais il s’agit toujours de la même tragédie humaine, celle du rejet de l’autre, pouvant aller jusqu’à la mort. Les histoires sont différentes, mais il s’agit toujours de dire la souffrance, de ne pas oublier, de donner des visages aux victimes. Et, dans les deux cas, l’actualité nous montre que le combat n’est pas fini, que l’on pense au drame des migrants ou à celui de l’antisémitisme. Dans les deux cas, il s’agit de garder l’espérance malgré tout.

Chère Marie Rajablat, avec le reporter-photographe Laurin Schmid, vous avez embarqué pendant six semaines sur l’Aquarius et, dans Les naufragés de l’enfer, vous avez recueilli les témoignages poignants de rescapés, de ceux qui ont connu une vraie barbarie. « Je ne pensais pas que des êtres humains pouvaient faire subir autant d’horreurs à d’autres êtres humains », témoigne Salim, un mineur isolé. Mais, chère Marie Rajablat, vous restez frappée par les images de sauvetages, comme autant de lumières dans la nuit. « On a du mal à repérer, écrivez-vous, puis on aperçoit un petit filament lumineux, on braque les projecteurs, et, soudain, on voit des silhouettes, des regards, des sourires ».

Vous donnez la parole et un visage à tous ces anonymes qui ont traversé l’enfer.

Cher Samuel Sandler, vous aussi et votre famille avez traversé l’enfer. Comment parler d’un tel livre de souffrance ? Vous avez écrit Souviens-toi de nos enfants comme un 2 livre-hommage, en mémoire de votre fils Jonathan et de vos deux petit-fils Arié et Gabriel, assassinés en mars 2012 devant l’école juive Ozar Hatorah de Toulouse. Dans ce témoignage bouleversant, vous rejoignez aussi l’histoire de votre famille, qui a su demeurer fidèle à sa tradition, même aux pires heures de la Shoah. Dans votre récit, vous rejoignez également toutes les autres victimes de l’assassin de vos proches, et leurs familles, quelles que soient leurs confessions. Comme celui de Marie Rajablat, votre livre contre l’oubli constitue, en dépit de tout, un acte d’espérance. Dans votre cœur, vos enfants sont toujours vivants. « La douleur ne triomphera pas du souvenir », écrivez-vous.

Monsieur Samuel Sandler pensait qu’en France, on ne tuerait plus d’enfants juifs après l’horreur de la Shoah. Un regard plus universitaire sur l’antisémitisme nous est offert par le professeur Carol lancu. Cette année, cher confrère, le jury a souhaité vous décerner une mention spéciale du Prix Seligmann, pour votre ouvrage scientifique Les mythes fondateurs de l’antisémitisme, de l’Antiquité à nos jours. Après avoir retracé l’évolution historique de la haine antisémite, vous y étudiez notamment comment l’antisémitisme constitue un phénomène marquant et inquiétant des temps modernes. Ce nouvel antisémitisme requiert notre vigilance à tous, en particulier au sein de l’école, car notre modèle républicain ne doit tolérer aucune forme de discrimination.

Au nom de la Chancellerie des universités de Paris, je voudrais féliciter chaleureusement chacun des lauréats pour son engagement et vous exprimer notre solidarité dans votre combat. La Chancellerie des universités de Paris s’honore de vous remettre le Prix Seligmann, dont elle partage les valeurs humanistes. « L’humanité tout entière peut être considérée comme un seul homme qui sans cesse apprend et se souvient », disait Pascal. Je vous remercie.

Je laisse la parole à Monsieur Guy Snanoudj, membre du jury.

 

Discours de Guy Snanoudj, membre du jury du prix Seligmann :

Monsieur le Vice-Chancelier,
Mesdames et Messieurs les personnalités présentes,
Mesdames et Messieurs,
Chers lycéennes et lycéens,

Nous voici donc rassemblés pour honorer les lauréats du 15ème prix Seligmann contre le racisme. Ce prix a été créé par Françoise Seligmann, que tous les membres du jury ont connue, appréciée et respectée.

Si vous prenez connaissance de la liste des lauréats depuis 2004, vous y verrez des noms connus et des noms moins connus. Mais tous les ouvrages couronnés ont un point commun : ils ont pour finalité de défendre la dignité des êtres humains et de lutter contre tout ce qui peut les avilir, les maltraiter, et parfois les exterminer.

Les deux livres couronnés au titre du prix 2018 répondent clairement à cette définition.

Pourtant, cette cérémonie organisée par les services de la Chancellerie des Universités que nous remercions, revêt aujourd’hui un caractère très particulier. Elle se tient 7 ans jour pour jour après le massacre de Toulouse qui a coûté la vie à trois enfants et cinq adultes, dont le père de deux des enfants. Or l’un des auteurs honorés aujourd’hui est le père et le grand-père de trois des victimes.

Par ailleurs, elle prend place durant la semaine d’éducation et d’actions contre le racisme et l’antisémitisme.

Quand le jury du Prix s’est réuni le 29 janvier pour délibérer, il ignorait ces coïncidences de dates, pas plus qu’il n’anticipait le regain d’antisémitisme et de racisme qui allait caractériser l’actualité nationale en ce début d’année 2019.

C’est donc sur la qualité des livres, et peut-être plus encore sur leur contenu, que le jury s’est déterminé.

Comme tout jury appelé à décerner un ou des prix, les années se suivent et ne se ressemblent pas. Le jury a parfois – rarement – du mal à désigner un ouvrage qui lui semble digne d’être distingué. D’autres fois – le plus souvent – il éprouve des difficultés non pas à choisir, mais à écarter des ouvrages de son choix. L’année 2018 relève clairement de cette deuxième catégorie. Parmi la trentaine de livres qui ont concouru, nombreux étaient ceux qui pouvaient être pris en considération. Pour simplifier, trois catégories de sujets ont émergé : l’antisémitisme, le racisme – y compris celui dont les Noirs d’Amérique ont été et sont victimes – et enfin les migrations subies.

Inutile de préciser dans quelle catégorie entre le livre de Samuel Sandler « Souviens-toi de nos enfants », qu’il a écrit en collaboration avec Emilie Lanez. Pour moi, il s’agit d’un livre qui se lit, qui se pense et qui s’ancre dans la mémoire. En parler est difficile. Car comment évoquer, commenter, évaluer un livre qui est un cri de douleur qui ne peut être compris que pas celui qui le pousse.

Tel que je le ressens, et avec un profond respect pour son auteur, il s’agit de la douleur d’un homme confronté à la pire injustice qui soit : la mort brutale, imprévisible, insupportable, d’un fils et de petits-enfants du seul fait d’un individu qui a perdu son humanité si on considère que la vie d’autrui est une des choses les plus sacrées, sinon la plus sacrée qui soit pour un être humain digne de ce noMonsieur Avec ce livre, Monsieur Sandler permet à ceux qui lui sont étrangers de donner un visage et une vie à des êtres qui sont, qui étaient partie prenante de sa vie. De sujets d’information pour le plus grand nombre, Jonathan Sandler, 30 ans, Gabriel Sandler, 6 ans, Arié Sandler, 3 ans, deviennent – si je peux me permettre – des êtres familiers qui nous aident à prendre encore plus la mesure du drame.

C’est vrai aussi de Myriam Monsenogo, 8 ans, tuée également de sang-froid devant l’école Ozar Hatorah. Quatre autres victimes ne sont pas oubliées, quatre militaires : Abel Chennouf, Mohamed Legouad, Imad Ibn Ziaten, tués, et Loïc Liber, resté paraplégique.

Ce livre est un mémorial. Permettez-moi d’en lire un extrait, qui exprime ce qu’aucun autre qu’un proche des victimes peut dire : « Ce livre est leur stèle, le parchemin où leurs rires, leurs chants, leurs pleurs et nos hésitations ne s’effaceront jamais, la fresque où mes enfants tués, mon cousin déporté, mes grands-parents pourchassés, mon père traqué, ma mère internée et ma sœur cachée prendront chair aux côtés de mon épouse, de ma fille, de ma belle-fille, de mes petits-enfants survivants et de ceux à naître, de mes amis, de mes professeurs, de nos élus, de mes frères juifs, catholiques, protestants, athées et musulmans. La chorale des morts et des vivants. » Est-il utile d’en dire plus pour expliquer pourquoi le livre de Monsieur Sandler a eu le prix Seligmann ?

Je vous disais en début de propos que le jury aurait voulu pouvoir honorer plusieurs livres, plusieurs auteurs. Ne pouvant en choisir que deux, selon le règlement du prix, il a choisi « SOS Méditerranée – les naufragés de l’enfer ». Il s’agit d’un livre de témoignages sur les actions de l’équipage de l’Aquarius, navire qui eut – ironie de l’histoire – des missions de garde-côtes et qui fut transformé en navire de sauvetage des migrants en perdition en Méditerranée. Il donne également, avec les récits rapportés et les belles photos de Laurin Schmid, un visage, une vie à certains des migrants recueillis à bord de l’Aquarius. Je précise : quand j’évoque de belles photos, je ne parle pas de la qualité artistique de celles-ci. Je trouverais cette seule approche déplacée. Je parle des personnes qui sont photographiées pour témoigner. Elles convertissent des statistiques froides, inhumaines quand elles sont destinées à effrayer le citoyen crédule ou mal informé, en destins d’hommes, de femmes et d’enfants. Ce livre est un hommage aux migrants sauvés, à celles et ceux qui les sauvent et qui les assistent. Il rappelle aussi que des milliers d’êtres humains n’ont pas  eu cette chance et qu’ils ont péri en mer avec toutes les souffrances, la panique et le désespoir qu’on ne peut qu’imaginer. Pour autant, la volonté de vivre des migrants et l’acharnement de leurs sauveteurs portent une part d’espoir qui se reflète dans le beau visage souriant d’une jeune femme qui conclut le livre.

Ce n’est pas le lieu ici de porter un jugement sur les politiques migratoires des pays européens, ni sur les arrangements avec des gouvernements ou des clans qui en tiennent lieu. Le sujet est trop compliqué pour prétendre le résoudre avec des idées simples. Mais le message du jury du Prix Seligmann est clair : il est du côté de ceux qui souffrent et de ceux qui leur apportent aide et assistance.

Il déplore donc l’immobilisation de l’Aquarius pour les sauvetages qu’il n’est plus en mesure d’assurer et pour le symbole des obstacles dressés devant ses missions. En attribuant un prix à Madame Rajablat, le jury du Prix Seligmann rend hommage aux anonymes, aux associations, aux ONG qui, quel que soit le prix à en payer parfois, choisissent d’aider leurs semblables. Gageons que plus ils seront nombreux, plus les politiques publiques se rallieront à leur philosophie.

Je souhaite conclure ce bref propos pour laisser la parole aux personnes honorées ce jour en évoquant un troisième livre : « Les mythes fondateurs de l’antisémitisme » de Carol Iancu. Le jury n’a pas pu lui attribuer un prix pour les raisons que j’ai dites. Mais il a tenu à lui décerner une mention spéciale pour souligner l’intérêt de cet ouvrage dont le titre est évocateur. Tout en récusant dès le début de son livre l’idée d’un antisémitisme éternel, Monsieur Iancu explique que cet antisémitisme vient de loin, de l’Antiquité, et donne à penser que son extinction, du moins sous nos tropiques, n’est pas pour demain. Et nous le voyons bien : que survienne une crise au Moyen Orient ou ailleurs, ou que surgisse une crise sociale, comme actuellement dans notre pays, et les ressorts de l’antisémitisme, qui n’avait pas disparu mais s’étaient tapis dans l’ombre, ressurgissent.

Au nom du jury du Prix Seligmann, je remercie les lauréats et Monsieur Iancu pour la part d’humanité qu’ils apportent, malgré les souffrances qu’ils ont endurées et endurent, et malgré celles dont ils ont été témoins ou dont ils témoignent. Qu’ils sachent que nous sommes à leurs côtés dans leurs combats.

Je vous remercie.

 

Discours de Samuel Sandler, lauréat du prix Seligmann 2018 : 

Monsieur le chancelier des universités,
Madame et Messieurs les membres du jury,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,

Je tiens tout d’abord à exprimer aux membres du jury du prix Seligmann m’a très profonde gratitude, pour le choix qu’ils ont fait en m’attribuant ce prix.

Prix qui récompense un écrit consacré à la lutte contre le racisme.

En ce jour de 19 mars, jour anniversaire de l’attentat antisémite devant l’école Otsar Hatorah de Toulouse, ce prix distingue avant tout le devoir de mémoire envers les victimes : mon fils Jonathan, mes petits-fils Arié et Gabriel et leur petite cousine Myriam.

Ce prix je le partage aussi avecmon éditeur Grasset , qui m’a invité et encouragé à écrire Souviens-toi de nos enfants, et naturellement avec Emilie Lanez, nos plumes et encrier ont fusionné…

Je suis particulièrement ému et touché par ce lieu prestigieux, la Sorbonne, où se déroule la cérémonie de remise du prix.

La Sorbonne, je n’ai plus fréquenté ses couloirs et amphithéâtres depuis un lointain jour de Mai 68. J’étais alors voisin, j’habitais rue Monsieur-le-Prince et j’étais étudiant en physique à la faculté des sciences , qui avait alors quitté la Sorbonne pour s’installer suivant l’expression de l’époque « à la halle aux vins ».

Et si j’ai gardé en mémoire le sujet de la revendication qui animait le grand amphithéâtre ce jour là c’est parce que je le trouvais particulièrement saugrenu, extravagant voire loufoque…

Mais depuis un certain samedi de novembre dernier, plus aucune revendication n’est susceptible de nous surprendre, donc le sujet qui avait enflammé le grand amphithéâtre était : le droit à la paresse…

Jusqu’ à mon entrée dans la vie active, où j’avais choisi de suivre mon épouse Myriam à Bordeaux, ville de sa famille, de ma naissance à la fin de mes études, je n’avais cessé de rôder autour des murs de la Sorbonne.

Avec mes parents, nous logions jusqu’à mes treize ans à l’hôtel Saint-Sulpice, en face du théâtre de l’Odéon, rue Casimir Delavigne.Mes parents dirigeaientun restaurant universitaire cachère, subventionné par le Copar, le Crous de l’époque, rue de Médicis, le Foyer israélite. J’ai fréquenté l’école maternelle rue Cujas, puis l’école communale du 9, rue de Vaugirard. Ma maîtrise de physique passée, je m’approchai des murs de la Sorbonne après avoir intégré l’école des Travaux publics boulevard Saint-Germain. Si je me permets de vous rappeler ma jeunesse passer au quartier Latin, c’est parce quemes rencontres, mes fréquentions d’alors ont un lien direct avec le prix Seligmann.

Mes parents travaillaient dur, de tôt le matin à tard le soir, sept jour sur sept. Sans appartement, je me retrouvais chez la patronne de l’hôtel Saint-Sulpice, madame Germaine Defrance, issue d’une famille bourgeoise originaire de Beauvais, et sa principale employée, Simone Leclerc, originaire d’un village voisin.

Dans l’hôtel j’ai vu défiler le monde et cela était naturel. Il y avait là le polytechnicien au pull troué, plongé dans les calculs d’un char futur, l’étudiant en médecine – sa chambre était décorée de maquettes d’avion et de squelettes. Un algérien de bonne famille, à l’allure distingué, y logeait régulièrement, mais un jour il fut arrêté, comme porteur de valises pour le FLN. Une dame juive y attendait pendant des années son visa pour les Etats-Unis.

Au restaurant de mes parents, pour leur plus grande fierté, se côtoyaient à une même table l’étudiant d’Asie, celui d’Afrique, et le juif pratiquant portant alors le béret et non la kipa. Ma mère étaient particulièrement soucieuse du bien être des étudiants originaires de ces pays lointains, parce que éloignés de toute affection familiale. L’origine des timbres de la collection de mon enfance en témoigne : Indochine, Afrique équatoriale française ou Afrique occidentale française.

Ainsi donc, entre l’hôtel et le restaurant, le fondamentalisme religieux, la xénophobie, le racisme, les discriminations, quelle que puisse être leur origine, tout cela m’était étranger.

Tout cela j’ai essayé de le transmettre à mes enfants Jennifer et Jonathan.

Alors, en ce 19 mars 2012, je n’avais pas compris pourquoi on s’était attaqué à Jonathan, Arié et Gabriel, je ne le comprends toujours pas, sinon que l’Islam radical venait de rejoindre le nazisme… Nazisme qui déporta depuis Le Havre ma grand-mère Pauline, mon oncle André, ma tante Mina et mon cousin Jeannot, sans oublier une grande partie de ma famille restée sur la rive germanique du Rhin… Islamisme radical, nazisme : ces idéologies criminelles qui décident de s’arroger le droit à la vie ou le non droit à la vie d’autrui.

Comme écrit dans Souviens-toi de nos enfants, ces quelques mots résument « l’histoire d’une famille juive sur un trottoir de France ».

Souviens-toi de nos enfants, ce livre qui est la stèle pour Jonathan, Arie et Gabriel, puisse-t-il être, grâce au prix Seligmann, gravé à jamais dans le souvenir de chacun de nous et constituer un rempart infranchissable face à l’intolérance, la haine, le racisme et la xénophobie.

 

 

Discours de Marie Rajablat, lauréate du prix Seligmann 2018 :

Difficile de prendre la parole à vos côté, M. Sandler, tellement l’horreur sidère. La tentation est grande de se taire mais le risque est aussi de détourner le regard. C’est la double peine infligée à celui qui a été touché dans sa chair : il devient à son tour « intouchable ».

J’ai en tête une de vos interviews dans laquelle vous disiez que vous aviez de la peine de voir le chagrin dans le regard de vos interlocuteurs, lorsque vous témoigniez. Alors je me ressaisis et me tiens debout, à vos côtés pour témoigner contre le racisme, l’injustice et l’intolérance.

Je n’ai pas été touchée dans ma chair comme vous, mais j’ai été touchée dans mon humanité si je puis dire, une nuit de novembre. Bénévole de l’association SOS MEDITERRANEE, qui recherche et secourt les personnes en détresse en Méditerranée centrale, je me suis embarquée sur son navire, l’Aquarius. Cette nuit-là donc, j’étais en passerelle, à fixer sur un fond noir d’encre, un mince trait luminescent puis de minuscules scintillements, lorsque soudain, des visages ont surgi de nulle part. En fait, ces lucioles qui scintillaient, n’étaient autres que le reflet des projecteurs sur les pupilles d’hommes, de femmes et d’enfants… Des regards vides, incrédules, hébétés … Pendant quelques fractions de secondes – qui m’ont paru une éternité – c’était comme si le temps était suspendu et j’entendais juste le clapot de l’eau sur la coque du petit bateau de bois bleu … De part et d’autre, nous nous regardions en silence. Eux n’y croyaient plus et moi, je n’y croyais pas. Comme le racontera ailleurs Erri de Luca , cette image est restée « tatouée » en moi.

Le flux migratoire c’est ça : un bateau de bois délabré de 8 à 10 mètres de long, bondé d’êtres humains à la dérive, qui n’ont aucune chance d’atterrir quelque part. Des êtres qui ont pris le risque de mourir car c’était à leurs yeux, le moindre de tous…

Cette vision formidablement étrange et irréelle, suspendue et condensée dans le temps, fait basculer l’ordre du monde. Difficile à mettre en mots le vacillement puis la dissolution de repères fiables, surtout lors du premier sauvetage. Qu’est-ce que c’est que ce monde-là ? Comment cela est-il possible ? Comment en sommes-nous arrivés là ? … Et moi, qu’ai-je fais jusqu’alors ?! … Autant de questions que nous nous posons sur les ponts, sans trouver de réponse.

Pendant qu’à terre, les ports se ferment et que les discussions politiques s’éternisent, à bord de l’Aquarius, nous mettons à profit ces jours d’errance imposés en pleine mer, dans l’attente d’un port sûr.

Avant d’arriver sur le navire, les rescapés ont été affamés, rackettés, humiliés, torturés, violés… Considérés comme des esclaves, des sous-hommes, ils ont été exclus du registre de l’humain par des geôliers qui leur ont fait vivre l’horreur dans des camps.

En Europe, ils seront en attente dans d’autres lieux de rétention pendant des semaines ou des mois ; ils seront parfois malmenés par des administrations ou par les forces de l’ordre ; ils devront constamment justifier de leur histoire, de leur parcours, de leurs intentions, de leur bonne foi. En amont comme en aval, ils ont été et seront enfermés, que ce soit dedans ou dehors.

Alors, sur les ponts de l’Aquarius, nous prenions soins de nos passagers comme on ne l’avait pas fait depuis des semaines, parfois des années ou peut-être comme on ne l’avait jamais fait. Isolés, exclus, les rescapés le sont, mais nous le sommes avec eux. Si au Nord comme au Sud, les rives lointaines sont hostiles et si tout autour de nous, la mer préleve son tribut, les ponts de l’Aquarius, eux, devenaient pour quelques jours un îlot d’humanité.

Dans ces circonstances, on ne triche pas. On va droit à l’essence même de l’être. Nous, équipes de SOS MEDITERRANEE, comme celles d’autres ONG, nous sommes les dernières digues contre lesquelles s’écrasent les déferlantes politiques déshumanisées. Et pour protéger notre humanité, la leur comme la nôtre, nous n’avons pas d’autres choix que d’affréter le plus rapidement possible un nouveau navire, un nouvel îlot éphémère où mettre à l’abri ces naufragés d’une mort certaine.

Nous avons connu une époque où notre association a reçu de nombreuses récompenses, des prix décernés par l’Union Européenne, par l’Unesco, par tel ou tel jury européen ou africain. Aujourd’hui nous sommes plutôt victimes de calomnies ou de mauvais procès. Les politiques pérorent et s’indignent contre ces ONG « qui trafiquent l’humain », ils barguignent des jours et des semaines comme des maquignons pour choisir sur dossier leurs migrants méritants et rejeter les autres vers la Libye en dépit du droit maritime international, etc… Il est clair que l’Humain pèse bien peu de chose aujourd’hui.

Alors oui, dans un premier temps j’ai été très étonnée que  « les Naufragés de l’enfer » ait retenu l’attention d’un jury en dehors de notre « entre-soi ». Serais-je devenue cynique ? Je vous prie de bien vouloir excuser ma méconnaissance initiale du Prix Seligmann. Évidemment j’ai vite comblé cette ignorance en lisant votre site de fond en comble. Et là, j’ai été très honorée d’avoir retenu l’attention d’un jury aussi prestigieux que le vôtre. Honorée aussi de figurer parmi tant de lauréats connus et reconnus. Aussi, au nom de toutes les équipes de SOS MEDITERRANEE, en mer ou à terre, je vous en remercie du fond du cœur.

 

Discours de Carol Iancu, récipiendaire d’une mention spéciale du jury du prix Seligmann 2018 : 

Monsieur le Vice-Chancelier des Universités de Paris,
Madame la Ministre,
Monsieur le Grand Rabbin de France,
Mesdames et Messieurs les membres du jury,
Mesdames et Messieurs,

Il m’est agréable d’adresser mes remerciements aux membres du jury qui ont décidé d’attribuer une mention spéciale au livre Les Mythes fondateurs de l’antisémitisme. De l’Antiquité à nos jours, et à la Chancellerie des Universités de Paris d’avoir bien voulu m’inviter pour en faire une brève présentation. Dans mon allocution je me propose de répondre à trois questions : a) Quelles sont les origines de ce livre ? ; b) Quels sont les principaux aspects de la problématique abordée ? ; c) Dans quel but ai-je écrit cet ouvrage ?

a) Quelles sont les origines de ce livre ?

L’origine lointaine remonte à un moment précis de mon enfance. J’avais 8 ans, je vivais dans une petite bourgade de Moldavie, dans l’un des derniers shtetels (mot yiddish qui désigne une localité avec une nombreuse communauté juive), aujourd’hui disparu. C’est alors que j’ai découvert une légende relative aux Juifs. En effet, à l’occasion de la Pâque juive, j’ai offert à mon meilleur ami et condisciple, fils de paysans pauvres d’un village voisin, une galette de pain azyme. Il a hésité à en prendre, en me posant cette question inattendue : « N’y a-t-il pas du sang là-dedans ? » Effrayé, j’ai aussitôt rompu la galette et commencé à en manger. Rassuré, mon ami a fait de même. Rentré à la maison, j’ai raconté d’un trait ce qui s’était passé à l’école à ma mère qui, d’une voix douce mais ferme, m’a fait savoir qu’« eux » – certains chrétiens -, croyaient dans cette affabulation, selon laquelle, pour la confection du pain azyme, les Juifs utilisaient du sang humain qu’ils mélangeaient à la farine et à l’eau… Ainsi, au XXe siècle, dans les années 1950, dans la République populaire roumaine, cette terrifiante légende médiévale était toujours vivace. Il n’est pas exagéré d’affirmer que cet événement m’a poussé plus tard vers l’étude de l‘histoire, et plus particulièrement de l’histoire des Juifs et des relations judéo-chrétiennes, en tenant compte du poids des mythes.

Une autre origine doit être cherchée dans mon engagement dans l’association des Amis de Jules Isaac où j’ai assumé pendant près de trois décennies la charge de secrétaire général, qui m’a permis de connaître la vie et l’œuvre de ce célèbre historien. Il a joué un rôle exceptionnel dans le combat contre l’antisémitisme, c’est lui le premier qui a dénoncé « l’enseignement du mépris » et « le système d’avilissement », deux termes devenus classiques, mais qui lui appartiennent. De même c’est lui, qui a fondé en 1948, l’Amitié judéo-Chrétienne de France. Par mon livre, j’ai souhaité, en lui rendant l’hommage qui lui est dû, poursuivre son combat, poussé aussi par la permanence et la violence des manifestations antisémites.

b) Quels sont les principaux aspects de la problématique abordée?

Comme indiqué dans le titre, je n’ai pas voulu écrire une nouvelle histoire de l’antisémitisme, mais de ses mythes fondateurs, depuis l’Antiquité et jusqu’à nos jours. Dans cette perspective, je me suis appesanti d’abord sur l’aspect linguistique des termes employés. Celui de « mythes » est compris dans  son acception usuelle, en tant que
« fiction », « fable», «invention de l’esprit », représentation d’un concept faux, mais généralement admis par tous les membres d’un groupe.  En liant ce mot à celui de l’antisémitisme, il doit être perçu comme une recréation  imaginaire d’une réalité fantasmée mais toujours accusatrice des Juifs. Les mythes fondateurs de l’antisémitisme sont, selon moi, « la projection de complexes engendrés par l’intolérance à l’égard de l’altérité juive ». L’antisémitisme, terme employé couramment pour désigner « la haine des Juifs » est apparu seulement à la fin du XIXe siècle. Il a été précédé par d’autres, les plus courants étant l’antijudaïsme qui comporte deux coordonnées principales, religieuse et sociale, et la judéophobie, forme particulière de la xénophobie, le rejet de l’«étranger », symptôme d’une perversion du rapport à autrui. L’antisémitisme en tant que phénomène moderne se nourrit de tous les griefs de l’antijudaïsme, mais comporte une donnée supplémentaire et «originale» : le racisme. Voici pourquoi, pour le définir, j’ai proposé l’équation suivante :  «antisémitisme = antijudaïsme + racisme ». L’antisémitisme désigne le racisme antijuif, bien que les Juifs ne soient aucunement une « race ». Au XXe  siècle, l’antisémitisme s’est «enrichi» de nouveaux aspects, parmi lesquels l’antisionisme, le révisionnisme et le négationnisme. La variante antisioniste, devenue politique officielle en URSS, dans les pays du bloc soviétique et dans le monde arabo-musulman, dénigre le mouvement national juif qu’est le sionisme, et l’assimile à l’impérialisme et même au racisme! La variante révisionniste tente de minimiser le nombre des victimes et l’ampleur de la Shoah, tandis que la variante négationniste vise à nier la réalité même de ce phénomène unique. Une fois établie la différence entre les diverses formes de l’aversion à l’égard des Juifs, j’ai expliqué pourquoi il ne faut pas  souscrire à l’idée fausse et souvent répandue de l’« éternel antisémitisme». J’ai essayé ensuite d’observer cette haine qui s’est développée dans deux religions et civilisations issues du judaïsme : le christianisme et l’islam, dans la perspective des légendes accusatrices.  Les mythes fondateurs de l’antijudaïsme chrétien théologique – le « crime du déicide », le « rejet d’Israël », la «dispersion comme châtiment divin de la crucifixion », le « judaïsme dégénéré » – se retrouvent déjà dans les Évangiles et surtout les écrits des Pères de l’Église. Certaines de ces accusations classiques sont entrées dans les codes juridiques pour justifier en quelque sorte la législation antijuive… D’autres effroyables calomnies ayant vite acquis la valeur de stéréotypes ont jailli à l’époque des croisades: «profanateurs d’hosties», «auteurs de meurtres rituels », « empoisonneurs de puits », «porteurs de peste ». Les Juifs médiévaux sont devenus des parias de la société chrétienne, des êtres discriminés dans la société musulmane, qui, en les accusant d’altérer le sens des paroles révélées, leur imposa le statut inférieur de « dhimmi », stigmatisés par des signes diffamatoires aussi bien en Orient qu’en Occident. Nombre de mythes comme le « Juif perfide » ou  le « Juif démoniaque » se sont maintenus tels quels jusqu’à nos jours, d’autres  en se recyclant, en passant d’une civilisation à l’autre. Le mythe médiéval chrétien du « meurtre rituel » est repris dans le monde arabo-musulman, avec un léger changement : le besoin de « sang chrétien » est remplacé par celui du « sang des non-juifs ». L’«empoisonnement des puits » est lui aussi recyclé et modernisé. D’après la nouvelle accusation qui vise les Israéliens, il ne s’agit plus d’empoisonner des puits, mais le sang avec le virus du sida, de répandre des nourritures avariées, des produits empoisonnés et des matières radioactives parmi les populations arabes en général et palestiniennes en particulier. L’antisémitisme moderne se caractérise par de nouvelles affabulations : le « complot judéo-maçonnique », la « conspiration juive mondiale », les Protocoles des Sages de Sion, le plus célèbre faux de la littérature antijuive, enfin le « complot judéo-bolchevique », composante constante de l’idéologie nazie. Après la guerre des Six Jours (1967), un « nouvel antisémitisme » revigoré par le négationnisme s’est manifesté par des mythes nouveaux ou «recyclés » : le « complot sioniste mondial », le «sionisme = racisme », la «collusion sionisme-nazisme», les mensonges scandaleux à propos d’Auschwitz. Un phénomène qui s’est radicalisé par la montée de l’islamisme dans les pays arabes les plus hostiles à Israël et dans certains milieux de la diaspora musulmane occidentale, manifestée en France par une vague d’attentats antisémites à partir de 2000. Le tout « nouvel antisémitisme » d’aujourd’hui est le résultat du double antisémitisme de l’Europe et des pays arabes et musulmans qui se nourrissent l’un l’autre ; il perpétue des archétypes éculés du « vieil » antisémitisme autant qu’il consacre des thèmes modernes alliant l’antimondialisation et l’antiaméricanisme à la détestation d’Israël et du peuple juif.

c) Dans quel but ai-je écrit cet ouvrage, qui a connu grâce à la direction des éditions Privat, cette deuxième version revue et augmentée ?

J’ai souhaité à travers une ample synthèse faire ressortir surtout les mythes du « nouvel » antisémitisme, avec des exemples puisés non seulement en France et dans les pays de l’ancien bloc communiste, mais aussi du monde arabo-musulman, attirant l’attention sur les dangers du racisme antijuif et sur la culture de la mort de l’islamisme terroriste jihadiste. Des textes nouveaux sont consacrés au déroulement de la Shoah dans les pays de l’Europe du Centre-Est, pour mieux faire connaître l’ampleur de la catastrophe du judaïsme, et pour mieux faire comprendre la persistance des mythes antijuifs ancestraux après 1945. Mythes perpétués non seulement dans les lieux où habitaient les survivants de la Shoah, mais aussi dans de vastes régions où le judaïsme a été entièrement éradiqué.  Je me suis investi dans une étude approfondie des racines de l’antisémitisme afin de mieux les comprendre pour mieux les combattre. Par cet ouvrage, je me suis attelé à la déconstruction des stéréotypes antijuifs, soubassements des mythes fondateurs de l’antisémitisme. Parmi les préjugés qui ont la vie dure, et qu’il faut constamment déconstruire : le Juif est celui qui possède de l’argent, qui est riche, qui est capitaliste, qui est immoral et dont la religion même est immorale ; le Juif qui fonctionne en réseau et serait à l’origine de tous les complots, judéo-maçonnique, américano-sioniste, et enfin du complot sioniste mondial. Il s’agit d’un combat permanent, dicté aussi par le caractère irrationnel de l’antisémitisme. Dans ce combat, des représentants du monde enseignant et associatif ont pris déjà leur part. J’y ai émis le voeu que leur nombre s’accroisse et qu’aux côtés des enseignants, des animateurs, des éducateurs, des responsables des médias et autres leaders d’opinion, se joindront de plus en plus d’intellectuels et décideurs politiques. Dans le contexte des tensions internationales actuelles, l’antisémitisme et le racisme risquent, hélas, de ne pas faiblir. C’est donc avec une vigilance accrue qu’il convient d’envisager l’avenir : l’objectif de cet ouvrage est aussi d’alerter et d’appeler à la prudence.

Monsieur le Vice-Chancelier des Universités de Paris, Mesdames et Messieurs, je vous remercie de votre attention.

 

Crédits photos : Prix Chancellerie des universités de Paris – Sylvain Lhermie